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Temps de travail + « Représentativité » syndicale : des mauvais coups pour en cacher d’autres

9 Juillet 2008 , Rédigé par PCF - Section Paris 15ème Publié dans #REPRESENTATIVITE SYNDICALE

Temps de travail  + « Représentativité » syndicale : des mauvais coups pour en cacher d’autres

Coup de force et précipitation. L’Assemblée nationale a voté hier le projet de loi hypocritement dénommé relatif à la « rénovation de la démocratie sociale et la réforme du temps de travail ». Deux jours avant la date prévue initialement du 10 juillet pour laquelle un rassemblement syndical était (est toujours ?) convoqué (12h00 derrière le Palais Bourbon). Contrairement à ce qu’en disent les media, il ne s’agit pas de la fin d’une « première lecture ». Le gouvernement ayant déclaré ce projet de loi « d’urgence », l’examen parlementaire ne comprendra qu’une seule lecture. Il reste le débat au Sénat.

Où est « l’urgence » ? Uniquement dans la volonté d’escamoter le débat public sur une loi d’une haute gravité pour l’avenir des relations sociales, du syndicalisme français. Le projet de loi comprend en effet deux parties : celle sur le temps de travail cache celle sur la modification de la reconnaissance de la représentativité des syndicats de salariés, des conditions de validation des accords sociaux et du financement des syndicats. 

Le Parlement aura ainsi à peine discuté de ces réformes capitales. Surtout, leur adoption sera passée presque inaperçue aux plus intéressés : les salariés, les syndiqués.

Le projet de loi reprend les dispositions du texte de la « position commune » adopté le 9 avril par le MEDEF, la CGPME, la CFDT et la CGT.

Force est de constater, comme nous le faisons en tant que militants syndicalistes, que l’information et la consultation des syndiqués, pour ne pas parler des salariés, malgré le caractère « historique » assigné au texte par ses signataires, ont été presque inexistantes. Seul l’appui aussi étonnant que répété du MEDEF, de son bureau national unanime et de Mme Parisot à la décision de la direction de la CGT a pu attirer l’attention sur un texte qui devrait, au minimum, ouvrir de profondes controverses.

A plusieurs reprises, nous avons analysé ses dispositions comme institutionnalisant un syndicalisme de compromis, de cogestion contre un syndicalisme de lutte et de classe. (Voir notre dossier: "représentativité": du syndicalisme de lutte au compromis)

On ne doit pas manquer de relever le caractère du texte. Une « position commune » ?

Sur le plan idéologique, l’expression est choquante, beaucoup plus qu’un « accord ». Elle porte en effet l’idée d’un diagnostic partagé, et pas n’importe lequel, sur les relations sociales entre ceux qui devraient normalement être adversaires de classes. Un « accord » pourrait quant à lui être l’expression d’un rapport de forces à un moment donné.

Sur le plan juridique, la « position commune », pourtant un texte structuré de 21 articles, n’a pas été dénommée « accord » expressément de façon à permettre au gouvernement d’y retoucher, en l’occurrence sur le volet temps de travail, l’article 17. Suivant la loi sur le « dialogue social », un texte d’accord entre organisations syndicales et patronales représentatives, sur une question soumise par le gouvernement, aurait été contraignant.

De quoi alimenter un soupçon d’hypocrisie sur l’ensemble de l’organisation du calendrier depuis avril.

Nous l’avons signalé, ce texte pose directement un problème politique, en particulier pour notre parti, le PCF, concernant notamment les liens qu’il doit avoir avec le mouvement syndical d’une part, avec les directions syndicales d’autre part.

En février, le PS n’avait pas voté contre le projet de loi déstructurant le droit du travail (« modernisation du marché du travail »), avançant qu’il résultait d’un accord entre patronat et une majorité de syndicats. Les députés PCF avaient voté contre suivant le refus de signer de la direction de la CGT (qui avait quand même accepté de négocier en amont).

En juillet, sur la « représentativité » syndicale, les députés communistes ont repris à leur compte et défendu le texte de la position commune en séance, certes en essayant, notamment par la voix de Roland Muzeau de ne pas en occulter certaines limites négatives.

Le vote sur l’ensemble du projet de loi aura fait passer cette position aussi inaperçue que l’ensemble du « titre 1 ». Le refus affirmé de la déréglementation et de l’allongement du temps de travail a justifié un vote négatif de toute la gauche (et du Modem).

Le volet sur le temps de travail aura ainsi été le seul à être vraiment discuté et commenté dans les media. Il comporte de nouveaux reculs très graves, finissant de remettre en cause les avantages des lois de 98 et 99 pour les salariés tout en maintenant et aggravant tous leurs avantages pour les patrons (flexibilité, exonérations de cotisation, cadre des négociations…).

L’attaque est particulièrement vive contre les cadres. Le passage dans la Loi de 218 à 235 jours du nombre de jours maximum travaillés pour les salariés au « forfait-jours » ouvre la voie à la remise en cause de toute leur RTT, jusqu’à menacer le repos des jours fériés.

Cela d’autant plus que la négociation s’effectue directement entre le patron et le salarié. En cas d’accord d’entreprise, on pourra déborder jusqu’à 282 jours !

Le projet de loi fait aussi sauter les contingents d’heures supplémentaires fixés par les accords de branche en cas d’accords d’entreprise, dans la limite de 48 voire 60 ou 65 heures par semaine à terme. Lorsqu’on laisse s’appliquer le cadre « social » de l’UE avec sa Charte des droits « fondamentaux », il ne reste quasiment plus de limite à l’exploitation !

Mais cette dernière disposition figurait déjà sous une forme peu différente dans la « position commune ». Son article 17 a ouvert la voie au gouvernement pour aller plus loin.Voir: 35 heures - Décryptage

Cela aurait dû ramener aux dispositions sur la « représentativité ». L’inversion de la hiérarchie des normes, c'est-à-dire la primauté donnée aux échelons où le patronat est tout puissant, le contrat individuel, puis l’entreprise, puis la branche, en dernier lieu seulement la Loi, est l’un de leurs plus graves dangers.

Le chantage à l’emploi exercé par Goodyear ces jours-ci pour imposer les 4X8 dans son usine d’Amiens en est une illustration.

Le pouvoir se montre très habile. Il utilise un mauvais coup, le nouveau démantèlement du temps de travail, pour masquer un autre mauvais coup : la refonte du cadre des relations au travail et de l’activité syndicale.

Mais on peut toujours dire aussi longtemps que l’on veut que Sarkozy est méchant et rusé. La question, c’est de le combattre et de ne pas rentrer dans son jeu.

Il est de la responsabilité des militants syndicalistes, comme des militants communistes, de pousser dans les mois qui viennent, malgré l’adoption de la loi, la réflexion et la discussion sur les dispositions voulues conjointement par le gouvernement, le MEDEF et les deux premières centrales syndicales.

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