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Analyse d'une lutte victorieuse contre une délocalisation

9 Octobre 2006 , Rédigé par Del Rizzo - Fête de l'Huma Publié dans #Défense de l'industrie

Analyse d'une lutte victorieuse contre un projet de délocalisation d'entreprise. Nous jugeons cette expérience particulièrement instructive. Nous reproduisons ci-dessous la restranscription de l'intervention de notre camarade Olivier Del Rizzo, responsable syndical à IP-Marti, membre du Conseil national du PCF, lors d’un débat à la Fête de l’Huma 2006

Les ingrédients d’une lutte victorieuse, Par Olivier Del Rizzo,

"Je vais essayer de tirer les enseignements de dix mois de lutte victorieuse pour contribuer au débat de préparation des assises. IPMarti est un équipementier automobile du bassin d’emploi de Montbéliard qui est le deuxième bassin d’emploi de France dans le berceau de l’automobile Peugeot. Le 1er novembre 2005, les dirigeants américains de notre entreprise qui appartenaient à une multinationale, ont annoncé aux salariés la fermeture de l’entreprise et le licenciement de l’ensemble du personnel ainsi que la délocalisation de la production sur le site italien. La réaction a été immédiate : on a refusé catégoriquement ce chantage et refusé un plan dit « social » : « le plan de sauvegarde de l’emploi ».

On nous proposait des chèques valises et on voulait que l’on se taise. On a refusé et engagé la bataille en nous appuyant sur le fait qu’il n’y avait aucune raison objective, ni financière, ni économique pour une telle décision. Durant la première phase de la bataille, pendant 63 jours, nous avons occupés l’entreprise. Avec beaucoup d’événements et d’enseignements forts.

J’en citerai quatre : 1- la solidarité territoriale : il y a eu une énorme solidarité de lutte et financière parce que l’entrée en résistance sur ces questions d’emploi et de délocalisation sur le bassin de Montbéliard a fonctionné comme un déclic face aux grands donneurs d’ordre. En effet cette décision du groupe américain de fermer l’usine et de délocaliser n’a pu être prise qu’en accord avec le donneur d’ordre PSA car IPMarti réalise 60% de son chiffre d’affaires avec PSA.Donc il y a une double responsabilité : celle de la multinationale américaine, mais également celle du donneur d’ordre. Il y a vraiment eu un grand mouvement de solidarité et les gens se sont reconnus dans ce conflit. 2- Le volet judiciaire : comme on occupait l’entreprise, évidemment les patrons de celle-ci ont fait une démarche judiciaire pour demander l’expulsion des salariés de l’entreprise. Mais à l’opposé de leurs attentes, le tribunal de Montbéliard a conclu autrement : il a déclaré l’occupation légale puisque les salariés protégeaient leur outil de travail, l’entretenaient, insinuant donc, que leur combat était juste. C’est une décision importante contre laquelle la direction a fait appel dans un premier temps. Mais par la suite, compte tenu du rapport de forces sur le pays de Montbéliard, elle s’est rétractée. Cette décision du tribunal fait maintenant jurisprudence. Tous les syndicalistes, qui, dans les entreprises, sont confrontés à ce genre de situation, pourront s’appuyer sur cette jurisprudence. 3- La responsabilisation sociale et territoriale de PSA : au départ les dirigeants de PSA ont déclaré qu’ils ne pouvaient pas s’immiscer dans les affaires de leurs fournisseurs. Mais, deux mois plus tard, le rapport de forces ayant grandi, la direction a été obligée de changer de position en assurant qu’en cas de repris, elle continuera à assurer une charge de travail à IPMarti. 4 - L’échec de la liquidation financière :Après avoir organisé l’assèchement de la trésorerie de l’entreprise, la direction a demandé à la Chambre de commerce de Montbéliard de prononcer la liquidation judiciaire de l’entreprise. S’il y avait eu liquidation judiciaire, il n’y avait plus d’entreprise, c’était fini. Donc, nous l’avons combattue avec notre cabinet d’avocats, le Cabinet Grumbach, et obtenu le redressement judiciaire de six mois. Or, comme il n’y avait plus d’argent dans l’entreprise, en principe, le juge aurait dû prononcer la liquidation judiciaire. Il a prononcé le redressement judiciaire uniquement parce qu’il y avait un rapport de forces important sur le pays de Montbéliard, et surtout parce que l’on avait avancé des propositions alternatives crédibles à la fermeture de l’entreprise. Dans cette lutte, à l’initiative des élus communistes s’est mis en place un comité de soutien sur le bassin de Montbéliard qui a réussi à rassembler très largement, notamment des élus de la résion dans leur diversité. Mais on n’a pas mis la charrue avant les bœufs. C’est parce que l’on avait des objectifs et des propositions crédibles que nous avons pu réaliser un large rassemblement et une grande mobilisation. Pendant six mois, on s’est fixé avec les salariés plusieurs objectifs : - maintenir la mobilisation, - Travailler avec les salariés et la population à un projet industriel porteur de propositions développant l’avenir de cette entreprise. - Travailler à la recherche d’un repreneur. On avait la garantie de PSA qui s’était engagé sur les marchés. On a retrouvé le repreneur en août dernier : une entreprise allemande. On avait mis une condition pour cette reprise : pas de fonds de pension. Aujourd’hui, l’entreprise à rouvert ses portes. On a accepté la reprise par un industriel déjà spécialisé comme équipementier automobile. Il s’agir de l’Allemand UKM de 500 salariés. Il s’est engagé à mettre en place le plan industriel et sur l’emploi. Avec des engagements précis pour que nous retrouvions l’ensemble des emplois d’ici un an. Aujourd’hui une dizaine de salariés n’ont pas encore repris le travail, mais ils se sont engagés dans une formation dans le cadre d’un contrat de transition professionnelle. Avec l’engagement écrit de l’entreprise devant les pouvoirs publics que l’ensemble des salariés sera repris dans l’année. C’est une belle victoire qui montre l’atout que reconstituent des propositions alternatives.

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