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Strasbourg intégré dans un Eurodistrict ? Nouvelle tentative de démantèlement du territoire national par l’UE.

25 Avril 2008 , Rédigé par PCF - Section Paris 15ème Publié dans #"Europe": NON à l'UE du capital

Strasbourg intégré dans un Eurodistrict ? Nouvelle tentative de démantèlement du territoire national par l’UE.

Par Anthony Crézégut, PCF Paris 15

Roland Ries ou le projet d’un « nouveau Washington DC»


A peine élu, le nouveau maire PS Roland Ries cherche à prouver que sa vision de l’avenir de Strasbourg déborde celle de la sortante UMP Fabienne Keller. Sur la droite !

Keller avait créé en 2005 l’Eurodistrict Strasbourg-Orthenau avec 5 communes allemandes. Ries veut en faire un « Washington DC » européen « au bord du Rhin »!

Pour l’instant, l’Eurodistict est juridiquement « une entité administrative européenne regroupant des agglomérations urbaines situées de part et d'autre d'une frontière », disposant d’une autonomie financière (tout en étant financé par l’UE). En s’appuyant sur des projets de coopération ponctuels et concrets, ce type de projet se fixe comme but final de créer un espace trans-frontalier politiquement et économiquement intégré. Le projet mis en route en 2005 n’a pas encore dépassé le cadre classique, en partie justifiable, de la coopération intercommunale. L’UMP en a rêvé, le PS va le faire !

Ries n’a pas tout trouvé tout seul. Il a des inspirateurs.

L’OTAN a décidé d’organiser son sommet de 2009 conjointement à Strasbourg et à Kehl. Il s’est empressé de la remercier : «l'événement ne pourra que renforcer la vocation européenne et internationale de l'espace urbain formé par l'Eurodistrict Strasbourg-Ortenau».

Le Maire de Strasbourg a surtout bien assimilé la devise de l’UE, « la concurrence libre et non faussée ». Strasbourg serait en concurrence avec Bruxelles qu’il faudrait devancer dans la création d’un « district européen » à statut juridique et fiscal propre. Ce serait la condition pour sauver le Parlement européen à Strasbourg, dont le siège est pourtant fixé dans les traités d’origine.

Le détail du projet lui-même permet de saisir la logique de l’UE « ultra-libérale » à laquelle M. Ries veut faire plier Strasbourg et la France : la destruction des territoires nationaux et des acquis démocratiques et sociaux qu’ils portent.Sur le plan institutionnel, l’eurodistrict est un moyen de contourner les assemblées démocratiquement élues. Ries veut passer de la « coopération à la codécision ». Des institutions trans-frontalières recevraient les compétences communales, disposeraient du pouvoir décisionnel, secondées par des comités d’experts et des commissions de travail thématiques sans légitimité. Les citoyens éliraient des municipalités dessaisies dans les faits de leurs prérogatives décisives. Le cadre de la souveraineté communale (et nationale) serait dépassé.

Les Euro-districts obéissent au même modèle que leurs grandes sœurs : la Commission et le Conseil européens contre les démocraties nationales, les euro-régions contre les exécutifs régionaux élus, les euro-districts contre les municipalités.

Quand l’Etat-nation devient une coquille vide, la démocratie devient un mot creux.

Au plan économique et social, en cohérence, l’euro-district permet de se débarrasser des législations, des droits sociaux nationaux. Déjà le projet de 2005 prévoit, entre autres, de « favoriser une  harmonisation des fiscalités », et une « harmonisation de la tarification et de la qualité des services ». Le nivellement pas le bas des droits des travailleurs (ex : statut de la fonction publique territoriale) et la remise en cause des services publics nationaux (ex : La Poste) sont en germe.

Mais où Keller avançait masquée, Ries n’hésite pas à « briser tous les tabous », jusqu’à revendiquer une forme « d’extraterritorialité ». Il propose la création d’un  « territoire transfrontalier à statut juridique et fiscal spécifique, attractif à la fois pour les institutions politiques et pour les sièges sociaux de grands groupes européens ».

En somme, il propose de créer une zone franche, une véritable zone de non-droit économique pratiquant le dumping social et fiscal, pilote pour les autres régions et pays européens. A mi-chemin entre les villes franches moyenâgeuses et les paradis fiscaux, entre les privilèges d’Ancien Régime et l’ultra-libéralisme de l’ère de la mondialisation. La visée « historique et modernisatrice » de l’UE n’est autre que l’assujettissement au capitalisme mondialisé.

Ce projet montre que l’UE est passée à un stade supérieur dans son ambition de liquidation du cadre national comme cadre référentiel de l’activité économique et politique. Jusqu’ici, elle tentait de contourner la nation, par le haut (avec les institutions supranationales), et par le bas (avec l’Europe des régions). Désormais, elle attaque frontalement le territoire national lui-même.

Ce type de projet ne peut pas ne pas être mis en parallèle avec le soutien de l’UE à tous les séparatismes régionaux. La reconnaissance de l’indépendance fantoche du Kosovo est un avertissement, un encouragement aux sécessionnismes, aux nationalistes.

L’extraterritorialité de Strasbourg serait un précédent historique, une parcelle du territoire national échapperait à l’autorité souveraine de la France pour être placée sous la tutelle, directe ou indirecte de l’UE.

Ries se prévaut du soutien de la RFA dont, on constate, que son projet ne heurte ni la conception fédérale, ni d’éventuelles prétentions expansionnistes. Côté français, conscient que « ce sera difficile » à faire passer, il comte sur Sarkozy et la présidence française de l’UE à compter du 1er juillet 2008.

Décidément 6 mois où la vigilance, la mobilisation et la riposte seront indispensables. 

Le cadre national est insupportable à l’UE du capital parce que s’y expriment la souveraineté des citoyens, les luttes des salariés, la résistance, comme en mai 2005, à une Europe nécessairement « libérale », car conçue par et pour les intérêts du patronat et du capital.

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